La loi du 21 janvier 2002 portant modification du statut de la Corse définit dans son article 12 que « la Collectivité Territoriale de Corse élabore le Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse ». Une première version de ce document devait être présentée pour adoption à l'Assemblée de Corse en août 2009, mais a été abandonné du fait d'une vive opposition : le CESC a pointé à plusieurs reprises le manque de concertation de la société civile dans l'élaboration du projet et les opposants au texte ont dénoncé son orientation, économique, vers la mono-activité touristique, faisant courir un risque important pour les ressources naturelles.
Prenant acte des difficultés de l'Assemblée de Corse à se saisir d'une procédure jugée trop lourde et souhaitant l'intégration des mesures définies dans le cadre du Grenelle de l'environnement, l'Assemblée Nationale a voté la loi du 5 décembre 2011 relative au plan d'aménagement et de développement durable de Corse qui modifie certaines dispositions encadrant la définition du PADDUC.
La nouvelle présidence de gauche, issue des élections territoriales de 2010, va donc se saisir de ce nouveau cadre et relancer le processus qui a abouti le 31 janvier 2014 à l'adoption par l'Assemblée de Corse de cette seconde version du PADDUC.
Notre propos sera ici de montrer comment ce processus a vu converger une demande sociétale de participation à ce qui est présentée comme un projet de territoire, mais plus globalement comme un projet de société à l'échelle insulaire, et un « impératif délibératif » (Loïc Blondiaux, 2008 ; Bacqué et Sintomer, 2011) qui doit également ré-assurer la légitimité politique de l'assemblée territoriale.
En effet, le PADDUC met en lumière la difficulté de rédiger un document qui doit prendre en compte la complexité du territoire insulaire corse (Meistersheim, 2001), mais également qui doit repenser la place des différents types d'acteurs de la société locale en intégrant de nouvelles logiques intégrant les citoyens dans la décision. Aussi nous intéresserons-nous à la manière dont ce dispositif participatif a été mis en place, notamment en nous considérant à la définition par le pouvoir territorial, de la population concernée (« résidents » de l'île ? « Corses de l'extérieur » ?), à la manière dont ce dispositif a été reçu par le « public » mais également à la nature et le contenu des contributions des différents acteurs impliqués dans le débat public. In fine, nous verrons en quoi le recours aux théories de la délibération et de la démocratie participative peut participer à l'opérationnalisation du concept d'auto-éco-re-organisation (Morin, 1980).
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