Aoun Oula

Le pilotage des mondes bricolés des mégaprojets à travers l'exemple de Dubai Marina
Oula Aoun  1, *@  , Jihad Farah  1@  , Jacques Teller  1@  
1 : Laboratoire LEMA, Université de Liège  (LEMA)
* : Auteur correspondant

De plus en plus, l'urbanisme semble devenir un « monde bricolé » . Il comprend acteurs, objets, règles et représentations, le rendant un monde d'émergences, de détournements, d'expériences et d'incertitudes. Ceci est perceptible particulièrement au niveau des mégaprojets.
L'ampleur, la complexité et surtout la durée de ces mégaprojets déstabilisent la logique d'ingénierie qui cherche, à travers des pratiques managériales et des indicateurs de performance, à assurer la matérialisation des intentions initiales des concepteurs . Dans le monde bricolé des mégaprojets, le pilotage devient ainsi, une façon d'aller au delà de l'ingénierie, d'intégrer les aléas en articulant de multiples bricolages.
Dans cet article, en nous basant sur le cas du mégaprojet Dubaï Marina, nous décrivons l'importance du pilotage, surtout celui de l'acteur pilote.
Dubaï Marina, un mégaprojet de 300 hectares, est un projet pionnier à Dubai. Conçu comme une nouvelle centralité, sa mise en place prend une décennie.
Bien que le projet soit porté par Emaar, une grande Holding parapublique, sa complexité mène à la déstabilisation des cadres de gestion ingénieuriale. Trois éléments en particulier contribuent à cela. Un premier élément est la structure et le mode opératoire des larges firmes globalisées de consultation et d'ingénierie impliquées. Le nombre important des firmes impliquées, leur fragmentation et la forte mobilité professionnelle de leurs employés rendent difficile toute continuité et cohérence. Le second élément est la volatilité du marché immobilier en lien avec ces grands projets. De fait, la puissance de l'image et la fascination ont un rôle central dans la commercialisation de ces projets phares . Toutefois, cette fascination est en lien avec les tendances cognitives, notamment architecturales, du moment, et souffre du long terme. De là la nécessité de continuellement réadapter et travailler le design et d'introduire de nouvelles références symboliques. Le troisième élément est l'urbanisation même de la ville. Sur une décennie, la structure urbaine peut dramatiquement changer. Le projet, doit ainsi faire face à un besoin de redéfinir son rôle ainsi qu'à une potentielle concurrence.
Face à ces éléments d'instabilité, le pilotage pris en charge par le PDG d'Emaar lui-même, permet l'adaptation et la stabilisation de ce monde bricolé. Il arrive à assurer la cohérence et faire évoluer la vision du projet en comptant sur sa position à l'intersection des réseaux politiques et d'affaires de Dubaï, sa connaissance du monde des firmes et son omnipotence au sein de son institution.



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