Les projets territoriaux portés par les universités madrilènes : une mise en scène de la fabrique métropolitaine ?
Lise Fournier  1, *@  
1 : LAB'URBA  (LAB'URBA)  -  Site web
Institut d'Urbanisme de Paris (IUP), Université Paris-Est Marne-la-Vallée (UPEMLV)
61 avenue du général de Gaulle 94010 Créteil Cédex -  France
* : Auteur correspondant

L'objet de cette communication est d'interroger la manière dont les projets territoriaux portés par les reconfigurations récentes des universités madrilènes révèlent une forme renouvelée de faire la ville. Dans un contexte de concurrence interurbaine accrue et d'affirmation métropolitaine, les universités, longtemps considérées comme un instrument de développement local, sont désormais au cœur des enjeux métropolitains. Présentées comme des acteurs centraux de l'économie de la connaissance, elles sont encouragées à assumer des rôles qui dépassent leur mission de formation et de recherche pour agir sur le territoire local en tant qu'acteur urbain (Dang Vu, 2011). Cette communication, reposant sur un travail de doctorat en urbanisme en cours, utilise la notion de projet territorial comme concept pertinent pour la compréhension de la fabrique métropolitaine madrilène.

Il s'agit tout d'abord d'analyser l'émergence de projets territoriaux en lien avec la labellisation des « campus d'excellence international » (CEI) dans la région métropolitaine madrilène. Les appels à projets ministériels CEI traduisent en Espagne une stratégie de métropolisation consistant à concentrer l'effort d'investissement sur quelques métropoles (Pinson, Rousseau, 2011), et notamment Madrid. Parmi les cinq CEI sélectionnés en 2009, deux d'entre eux, la « Ciudad Universitaria de Moncloa » et le « CEI UAM-CSIC » s'appuient sur un projet territorial madrilène. La Ciudad Universitaria, imaginée en 1927, constitue l'un des aménagements urbains les plus emblématiques de la capitale espagnole, un territoire de 460 hectares entièrement dédié à l'enseignement supérieur et à la recherche au nord-ouest de la ville. La labellisation CEI apparaît ici comme le résultat d'un plan spécial adopté par la mairie de Madrid en 2000 pour développer un projet territorial unitaire pour ce territoire spécifique. Au contraire, dans le cas du « CEI UAM-CSIC », il s'agit d'inventer un nouveau territoire, Madrid Norte, à partir du projet de campus territorial porté par l'université Autónoma qui développe depuis peu les relations avec son environnement, rompant ainsi avec l'image du campus de Cantoblanco longtemps considéré comme un « ghetto universitaire » (Gómez Mendoza, 1987).

Ces projets territoriaux naissent des reconfigurations récentes des universités madrilènes qu'il s'agira d'interroger. Dans le premier cas, le projet territorial de la Ciudad Universitaria résulte des collaborations établies entre les universités Complutense et Politécnica et les autres institutions dédiées à la recherche (CSIC, CIEMAT, INIA) présentes sur le site de la Moncloa. Dans l'autre, le projet de campus territorial Madrid Norte s'appuie sur la mise en place de structures promouvant les partenariats publics-privés entre l'université, les organismes de recherche, le parc scientifique et les associations entrepreneuriales voisines.

Il s'agira enfin de conduire une réflexion sur le projet territorial comme symbole d'une nouvelle manière de faire la ville et traduisant des pratiques urbanistiques renouvelées, marquées notamment par l'irruption des communicants. Le projet territorial porté par les universités madrilènes illustre un urbanisme fictionnel (Matthey, 2011), où la production narrative prend le pas sur la production réelle de ville et de territoire.

Références bibliographiques :
Dang Vu H., 2011, L'action immobilière des universités mondialisées. Le Plan campus au regard d'expériences américaines, britanniques et belges, Champs-sur-Marne, Université Paris Est, thèse de doctorat en aménagement et urbanisme.
Gómez Mendoza, J. (dir.), 1987, Ghettos universitarios. El Campus de la Universidad Autónoma de Madrid, Madrid, Universidad Autónoma de Madrid.
Matthey L., 2011, « Urbanisme fictionnel : l'action urbaine à l'heure de la société du spectacle », Métropolitiques, http://www.metropolitiques.eu/Urbanisme-fictionnel-l-action.html.
Pinson G., Rousseau M., 2011, « Les systèmes métropolitains intégrés – état des lieux et problématiques », Territoires 2040, n°3, pp. 29-60.



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